Je m’appelle Levi, je suis burundais, j’ai 27 ans et suis le fondateur du foyer Imuhira.
J’ai eu un parcours très privilégié comparé à celui des autres jeunes de mon pays. Mon père m’a inculqué l'importance de l’école, venant lui même d’une famille nombreuse et très pauvre, où son frère aîné a dû sacrifier sa propre scolarité afin qu’il puisse accéder à l'école. Il m’a toujours répété que d’aller à l’école et travailler c’était s’offrir un avenir. J’ai donc pris à coeur mes études et ai même poursuivi des études supérieures.
Cette création est née d'une frustration. Plus je grandissais, plus j’ouvrais les yeux sur la dure réalité qu’était celle de mon pays et voyais que ma chance n’était pas celle de tout le monde autour de moi. En effet la plupart des enfants que je croisais n’étaient pas scolarisés, n’étaient pas soutenus, n’étaient pas aimés.
Ce sentiment de frustration me devenait insupportable et j’ai donc décidé à la fin de mes études de m’orienter vers une carrière qui me permettrait d’avoir un impact positif sur ma société et de venir en aide à ces enfants à qui personne ne tendait la main. J’ai alors commencé à travailler pour l’organisation New Generation Burundi dans laquelle je parvenais petit à petit à façonner mon rôle et à inclure le sujet des enfants de rue à mon département. Je passais mes vendredi dans les rues à recueillir les témoignages de ces êtres dont l’humanité semblait avoir oublié l’existence.
Le foyer Imuhira et mon espoir de sauver la vie de quelques uns de ces enfants étaient nés.
A la fin de l’année 2015 je fis la rencontre de Lameth. Un jeune garçon à l’époque âgé de 12 ans qui vendait des arachides dans la rue. C’est à ce moment que tout commença.
Lameth me raconta son histoire. Sa petite enfance marquée par la perte de ses frères aînés, la pauvreté de sa mère et l’alcoolisme de son père et enfin sa décision de fuir jusqu’ici à Bujumbura à la recherche d’un avenir meilleur. Et finalement sa nouvelle réalité. Il vivait depuis 4 ans seul dans la rue, faisant face quotidiennement à la faim et l’insécurité.
Ce qui me marqua chez le petit Lameth, au delà de la peine dans ses yeux, c’était sa volonté et sa détermination. Lameth voulait s’en sortir, et pour des raisons qui me sont encore inconnues, il espérait encore, même après avoir vécu l’horreur pendant quatres années.
C’est ça qui m’a poussé en 2017 à déménager de chez mes parents afin de recueillir Lameth pour qu’il puisse retourner à l’école. Lameth me prouva alors une fois de plus son courage sans faille, ramenant à la maison des résultats exemplaires pour un enfant n’ayant pas été à l’école pendant 4 années. Le foyer Imuhira, qui signifie 'mon chez moi' en Kirundi, et mon espoir de sauver la vie de quelques uns de ces enfants étaient nés.
Je me retrouvais donc avec 4 enfants à ma charge et avec mes maigres revenus il me devenait de plus en plus dur de subvenir à nos besoins.
Dans les mois suivants je rencontrais Eric et Dieu Merci, des enfants qui tout comme Lameth étaient plein de bonne volonté et d’énergie malgré leur dures histoires (lire leurs histoires). J’ai donc décidé de les prendre également sous mon aile. Finalement en 2018, Lameth m’avoua l’existence de son petit frère Levis qui se trouvait en prison.
En effet suite aux lois de 2017 interdisant la présence d’enfants errants dans les rues, ces derniers se sont emprisonnés. Ainsi nombreux sont les enfants comme Levis qui n’ont commis aucun crime, si ce n’est celui de ne pas avoir de refuge ou de famille, se retrouvant dans des prisons insalubres amenuisant un peu plus leurs chances de survie. Naturellement je décidais de venir en aide au petit frère de Lameth et de le recueillir.
Je me retrouvais donc avec 4 enfants à ma charge et avec mes maigres revenus il me devenait de plus en plus dur de subvenir à nos besoins. J’ai eu la chance de rencontrer différentes personnes qui m’ont soutenu moralement et financièrement dans ma lutte pour les enfants, notamment Reine Anani et Giorgio Colombo. Cependant ce modèle n’était pas viable et je savais qu’il m’allait être compliqué de continuer ainsi.
En mars 2019 l’histoire du foyer pris un nouveau tournant. Je rencontrais alors Mélie Dunod.
En mars 2019 l’histoire du foyer pris un nouveau tournant. Je rencontrais alors Mélie Dunod. Elle et sa famille avaient pour projet de venir en aide aux enfants les plus démunis et une connaissance commune nous a mis en contact.
Nous étions sur la même longueur d’onde, nous avions la même vision de ce que nous souhaitions construire et il semblait que nous étions très complémentaires dans nos expériences et capacités. On s’accorda très vite sur l’organisation suivante: Mélie et sa famille seraient responsables pour du financement et de la budgétisation pendant que je m'occuperais du développement du centre et des enfants sur place. Nos méthodes de travails ont beaucoup évoluées et nous avons aujourd’hui développé des budgets très précis. De par ces performances en gestion des financements, nous avons pu nous permettre d’adopter 5 enfants de plus.
Le foyer compte aujourd’hui 11 enfants et il semblerait que ca ne soit que le début. De nouvelles personnes ont rejoint notre projet, tout comme Chesco Igual, directeur technologique d’une startup londonienne, qui nous prête de son temps afin de faire connaître et évoluer le foyer.